Monday, June 29, 2015

Grèce: Le deuxième principe d’Archimède


Le deuxième Principe d’Archimède illustré. 
Photo ET


















Grèce : Le deuxième principe d’Archimède

“Tout Etat membre de l’UE endetté d’un milliard subit de la part de l’UE une pression du haut vers le bas intenable.

Tout Etat membre de l’UE endetté de plus de 100 milliards exerce sur l'UE une pression du bas vers le haut insurmontable. »

En effet si vous devez 1 million à votre banque, la banque vous possède. Si vous devez 1 milliard à votre banque vous la possédez. Sachant cela, au cours de 6 mois de « négociations » avec la Grèce, on aurait pu avoir le résultat d’aujourd’hui en un jour. En effet, la Grèce n’a jamais eu l’intention ni les moyens de payer. Il lui faudrait un siècle sans doute pour le faire.

J’ai entendu M. Juncker, Président de la Commission européenne aujourd’hui se lamenter que « ….. surtout toute la vérité n’a pas été dite ». C’est ce Monsieur qui a fait du mensonge un credo politique : « Quand les choses deviennent sérieuses, il faut mentir «. Il aurait pu dire aussi que les dés sont tombés. Mais il a préféré appeler les Grecs à voter « oui » au référendum qui produira un « non » massif.

En attendant de ramasser les morceaux, les banques grecques sont fermées, les marchés financiers chancellent, et nous avons la preuve que nos dirigeants ne sont pas à la hauteur de la physique d’Archimède. Ils cherchent les options pour éviter la contamination européenne. On sauvera les banques avant les Grecs.

Et le spectre du crime politique chypriote de 2013 commence à jeter son ombre: la confiscation d’une partie (40%) des comptes d’épargne à partir d’un certain montant. Vous avez oublié ? Le Feierwon y était :




Saturday, June 27, 2015

Le théâtre grec vient d’inventer le vaudeville

L’Euro s’éclipse sur le Pirée. Photo Kohl/Mitterrand


Le théâtre grec vient d’inventer le vaudeville

Ce que certains voudraient appeler un drame, qui inexorablement se déploie vers une fin fatidique, est plutôt un vaudeville avec ses rebondissements attendus et ses interprètes qui deviennent de plus en plus des bouffons stéréotypés : les paresseux, les fourmis qui ne veulent pas partager leur yam, les vertueux, les incorruptibles, les corruptibles, les tricheurs, les intransigeants, les manipulateurs et les inévitables cocus de l’histoire : certains créanciers.

Inattendu dans les rebondissements est l’annonce d’un référendum en Grèce le 5 juillet. Admirez la prouesse, le fait d’arriver à organiser une telle opération d’envergure dans un pays moribond en 8 jours ! Alors que d’autres initiatives politiques échouent l’une après l’autre.

Mais ce référendum n’est autre qu’une demande de confirmation du mandat implicite du gouvernement grec reçu de l’électeur l’année passée : on ne payera plus les dettes, advienne que pourra. Bien-sûr, ce consensus grec s’est un peu érodé, sans doute dû au contact des dirigeants grecs avec la nomenclature européenne à Bruxelles. Trop d’embrassades décentrent les cravates.  Le référendum servira à les recentrer et à fournir l’alibi incontournable pour l’échec des « négociations »  sans fin.

Ce blog a déjà mis le doigt sur la plaie en 2012, quand on assistait à une valse d’hésitation du Président de l’Eurogroupe de l’époque, maintenant Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. Le titre absurde de ce blog est toujours d’actualité : Il ne faut pas que la Grèce ne puisse pas ne pas quitter la zone Euro.

A vrai dire, les racines du mal se trouvent dans les fautes commises au cours de la construction européenne, qui trop souvent attelle la charrue devant les bœufs. Car la finalité de la construction européenne n’a jamais été définie. J.C. Juncker en prenant ses fonctions actuelles a déclaré que « nous » ne voulons pas des Etats-Unis d’Europe. Sa camarade de parti, Viviane Reding dit le contraire 2 semaines plus tard. Le référendum grec donnera une partie de réponse.

Il est clair que planifier pour une monnaie commune dans des futurs Etats-Unis d’Europe est sage, car gouverner c’est prévoir. L’introduction prématurée de l’Euro était une faute, née de la vanité de ses promoteurs, avides de se poser un monument. Il est clair que c’était le couple franco-allemand de l’époque, alors qu’au moins le côté français aurait dû avoir des frayeurs quant au futur et notamment au sujet du différentiel chronique dans les performances économiques entre les deux pays. Quelques réflexions élémentaires dans le domaine de l’économie politique produisent facilement les menaces inhérentes à l’Euro pour les économies les plus faibles, comme dans l’exemple du couple franco-allemand justement.  

En effet l'anémie chronique de l'économie française comparée à celle de l'Allemagne est bien documentée par l'évolution historique du FF, le « Nouveau Franc » de de Gaulle face au DM: le taux de change était de 1,17 FF pour 1 DM en 1960 pour tomber à 3,50 FF pour 1 DM la veille de l'introduction de l'Euro en janvier 1999. Une érosion de 190% environ face au DM en 40 ans ou près de 5% par an! Depuis lors l'ajustement par dévaluations successives est devenu impossible, la France ne pouvant dévaluer son Euro. C'est donc une autre variable dans l'équation de la compétitivité qui a dû céder: c'est le chômage qui augmente. Et la spirale infernale est engagée: perte de revenus, perte d'opportunités, chômage, augmentation des dépenses, emprunts, augmentation des impôts, austérité, la course vers le fond. L’économie la plus faible dans cet univers Euro, la Grèce, est la première à toucher ce fond.

En attendant une Union de plus en plus étroite, comme le demande le Traité de Rome, l’ECU (European Currency Unit) d’il y a quinze ans, jouait parfaitement le rôle de monnaie unique provisoire. Elle était en fait une moyenne pondérée des monnaies nationales, et des opérations importantes étaient libellées en ECU. Et l’ECU permettait la dévaluation plus ou moins contrôlée d’une monnaie dans la corbeille.

La morale de l’histoire est que sans définir le but final de la future intégration européenne comme étant la création des Etats-Unis d’ Europe ou de la Confédération Européenne, il faut s’abstenir d’aventures communes qui sont du ressort d’un gouvernement central : ce sont la politique étrangère commune, l’Armée européenne, et hélas, la monnaie commune.

La Grèce et l’Europe paient cher la vanité et l’incompétence de ses dirigeants.










Wednesday, June 3, 2015

Un peut-être au référendum ?


The Constitution. Can you see it? Photo: Thomas Jefferson




















Un peut-être au référendum ?

Bien-sûr, ce « peut-être » est une boutade. Elle souligne d’un côté l’aspect absolument positif du principe du référendum, d’ ailleurs supporté par tous les grands partis, y compris jadis le CSV. Elle voudrait aussi éclairer les faiblesses de sa mise en route actuelle et les hésitations qu’elle engendre. Et donc la boutade voudrait confirmer que l’électeur est en face de décisions qui ne sont pas faciles à prendre, qu’il est finalement seul à les prendre, et que toute analyse approfondie des questions posées lui fera tourner la tête. A moins que vous n’ayez la certitude d’un inconditionnel très discipliné du « oui » ou du « non » catégoriques recommandés, voire imposés, par les partis et les groupes d’influence.  

L’ombre de la quatrième question avortée

La question d’un référendum sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat était une des bases du succès électoral de la présente coalition. Or cette question a été retirée du référendum. C’est une faute qui projette une ombre sur tout le vote du 7 juin. Alors que cette question était destinée à être l’ancrage de la consultation populaire, sa disparition a propulsé la seconde question en ordre d’importance, le droit de vote des étrangers, en haut de l’affiche. Nul doute que cette nouvelle vedette devient d’autant plus controversée, qu’elle n’est plus éclipsée par la question de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, qui selon beaucoup d’observateurs allait être approuvée par une bonne majorité. Parmi ces observateurs figure certainement l’Archevêque de Luxembourg, qui en excellent stratège issu des écoles jésuites, a frappé avec détermination par une manœuvre préventive réussie, évitant ainsi que le peuple souverain ne termine une relation millénaire avec l’Eglise de façon définitive. 

L’Archevêque s’est ainsi confirmé grand Homme d’Etat, qui sait agir quand les possibilités de ceux en face sont en sa défaveur. En plus, sa victoire relative a affaibli la crédibilité du référendum résiduel, sans que l’Eglise ne doive s’en mêler vraiment et directement pour avancer ses opinions.

Le droit de vote des étrangers est devenu la question vedette

Ça, c’est une valse ! Si je vais fouiller dans mes vieux bagages idéalistes, la réponse est indubitablement « oui ». Ce même moi a idéalisé les grands exemples d’actions en faveur du progrès de l’humanité, la paix mondiale si souvent citée par les candidates au titre de Miss Monde, et même les Nations-Unies pour leur potentiel à faire le bien.  Mon ton révèle sans doute qu’au contact avec les réalités, (les Nations Unies bien-sûr),  mon oui euphorique devient un « oui mais ». Pourquoi ? Comme dans l’exemple de notre Archevêque, un Homme d’Etat ne cède jamais rien pour rien. L’Archevêque a cédé, mais a sauvé l’essentiel. Le Luxembourg par contre a mal choisi l’heure et l’endroit pour lancer la question du vote des étrangers. Il ne propose même pas de négocier pour céder un droit, il l’offre pour rien en contrepartie, et au mauvais moment.

L’occasion eut été d’en faire le cheval de bataille de la Présidence luxembourgeoise de l’UE à partir du 1er juillet. En manœuvrant ainsi, plusieurs intérêts gouvernementaux auraient pu être atteints : Présenter l’initiative du vote étranger (européen ?)comme la question du moment primant tout au niveau européen, et obtenir du coup en principe la réciprocité pour le vote des luxembourgeois à l’étranger. La réciprocité est un principe fondamental de politique internationale.

La véhémence des débats que l’on observe actuellement, où l’emploi de noms d’oiseaux n’est pas rare pour invalider l’opinion d’autrui, aurait été dans un contexte plus vaste et moins polarisé. Enfin le Luxembourg aurait gagné en crédibilité comme élève modèle de la construction européenne. Car enfin si le vote des étrangers (européens) est vu avec méfiance dans certains quartiers, comment ne pas remarquer que s’il y a quelque chose à perdre avec l’octroi de ce droit, le Luxembourg avec presque 50% d’étrangers aurait à perdre le plus. Enfin, la perception actuelle du Luxembourg, une sorte de nation branding involontaire comme nid de fraudeurs du fisc, se serait estompée en faveur du Luxembourg hardi, terre d’accueil des étrangers. Le Luxembourg, bâtisseur de l’Europe.

En attendant, le niveau d’amertume du public qui confond pêle-mêle les notions de peuple, de nation et de citoyen est sidérant. Mais quel que soit le verdict de l’urne, la stratégie européenne ne sera pas obsolète. A moins qu’on ne veuille pas construire les Etats-Unis d’ Europe.

Le droit de vote à 16 ans

C’est une lubie, bien sympa, mais une lubie. En atteignant l’âge de 16 ans, l’arithmétique vous donne, à vous les jeunes, seulement 2 chances sur 5 de voir une élection avant que vous n’atteigniez 18 ans de toute façon. Je pourrais compléter cette vision du vote à 16 ans en donnant à votre papa ou à votre maman le droit de vote pour vos plus jeunes frères et sœurs, donc le droit de vote universel élargi jusqu’aux bébés, mais exercé par les parents. La justification ? Bof, en voilà une : ces parents élèvent les futurs piliers de notre société basée sur un contrat social qui fait que la redistribution des revenus supporte les vieilles générations par le travail des jeunes générations. Ce serait un vote pondéré sur le nombre d’enfants mineurs élevés par les futurs vieux. Car enfin, les bébés d’aujourd’hui n’auraient rien à dire quant aux grands choix de société pour demain ? Cette idée est peut-être une lubie aussi. Elle me sert à mettre en exergue le degré d’urgence et de maturité dans l’innovation politique qu’est le vote à 16 ans.

Comme d’ailleurs pour les étrangers la question de l’accès à l’éducation civique des jeunes avant un premier vote mérite d’être évoquée au préalable.

La limitation des mandats

Que ce soit au Luxembourg ou aux Etats-Unis où j’habite, je ne veux pas d’une Hillary Clinton ni d’un Jeb Bush. Comme si de telles dynasties étaient inévitables dans l’intérêt du pays. La pérennité du pouvoir mène à l’inceste politique et aux systèmes corrompus. J’espère qu’il n’est pas nécessaire de faire un dessin pour illustrer le cas luxembourgeois. Je supporte sans hésiter le « oui », et je me défendrai d’avoir été influencé par quiconque.

La limitation des mandats combattra la stagnation, la paresse, les évolutions mafieuses qui elles ont besoin de temps pour s’épancher, et stimulera le nombre des aspirants politiques trouvant la voie dégagée par les fossiles politiques jadis inamovibles. Si les vétérans ainsi remplacés ont vraiment des idées à contribuer à leurs successeurs, le choix leur est permis. Si entretemps ils ne se sont pas refugiés chez Gazprom ou Deutsche Bank. 

Finalement une nouvelle culture politique

Malgré les ratages dans la conception du référendum, il faudra surtout célébrer son existence. C’est une nouvelle culture démocratique qui s’installe, où gouvernement et électeurs sont néophytes. On sera donc indulgent, surtout qu’un autre référendum sur la Constitution se pointe à l’horizon 2017. Occasion de revoir certaines questions ? Il ne sera jamais trop tôt pour lancer ce débat, surtout que le projet de texte sur la table laisse à désirer : il fourmille de qualificatifs comme « sera déterminé par la loi », ce qui annule potentiellement l’article énoncé par un vote majoritaire au Parlement. Il faut y remédier pour énoncer surtout des principes et non pas des petites règles flexibles selon la volonté des partis majoritaires.

Finalement ce 7 juin retenons que l’électeur luxembourgeois expérimente une sorte d’émancipation politique nouvelle. C’est ce moment solennel où en tant que souverain il se trouve seul devant des questions à trancher lui-même dans le secret du vote.