Banque Internationale à
Luxembourg: L’homme qui a vendu la Banque BIL deux fois pour deux fois rien.
Les aléas de sa carrière ont mis Luc Frieden dans la situation unique de
vendre la BIL deux fois en 5 ans : une fois pour le Luxembourg, puis une deuxième
fois pour le Qatar. Il a mieux fait pour le Qatar que pour le Luxembourg.
La première vente de la BIL à Precision Capital, fond appartenant à la famille
régnante du Qatar et devenu investisseur luxembourgeois par domiciliation, était
ficelée dans la précipitation à un prix de braderie en 2011-2012 suite à la
crise de DEXIA. Le marché s’attendait à une transaction d’Euros 900 millions ou
plus, malgré cette crise. Precision Capital a enlevé la Belle, fleuron
historique des banques luxembourgeoises, pour 657 millions d’Euros. L’année de référence
pour déterminer la valeur de la banque était l’année 2010. Elle avait alors un
revenu net d’Euros 240 millions.
La seconde vente au Legend Holdings chinois est à considérer selon le cas comme
étant pour deux fois rien ou au contraire pour un incroyable multiple de 5 fois
plus.
C’est deux fois rien si l’on considère les opportunités perdues : la
BIL n’a pas pu reconnecter avec son niveau de revenus de 2010, c.à.d. Euros 240 millions. Il y a eu bien-sûr le
moment de crise de DEXIA de 2011-2012. Mais la BIL avait gardé ses possibilités
de performance inhérentes. Cette performance n’était que d’Euros 134 millions
de revenus nets en 2015, une bonne centaine de millions de moins qu’en 2010, et
d’Euros 110 millions en 2016, un autre recul de 24 millions. Malgré ce recul, l’investisseur
stratégique Legend Holdings est d’accord pour payer plus de 13 fois le revenu
net de 2016. Il faut sous-entendre que la relativement faible performance de la
banque en 2016 a diminué sa valeur, peut-être de près de la moitié de son
potentiel démontré en 2010. Ce n’est pas deux fois rien, mais cela aurait pu être
deux fois plus.
Quoiqu’il en soit, les chiffres de 2017 sont bons malgré le manque à
gagner. En prenant les revenus de référence comme base, la transaction de 2017 se
fait sur moins de la moitié des revenus de 2010, en l’occurrence 240 millions
en 2010 contre 110 millions en 2016. Sur cette base la seconde vente en 2017 est
de 5 fois supérieure à celle de 2011. Dans les circonstances, c’est très, très
bien pour le Qatar.
Le Qatar s’y retrouve à Luxembourg : il y est implanté, y a été courtisé,
et vient de faire une bonne opération, en réalisant en moins de 5 ans une
plus-value de 823 millions d’euros soit au total plus de 125%. Cela vaut un
bonus au personnel ?
L’aventure Cargolux n’a pas été un fiasco pour le Qatar non plus. Seulement
pour Cargolux. L’achat et la revente des parts de QR dans CV se solde par une
somme zéro. Mais les droits internationaux acquis par QR au Luxembourg au cours
de cette aventure n’ont pas été rescindés par le Luxembourg, et le know-how
acquis pendant la transaction et la période de coopération est précieux.
Reste la KBL. Elle n’est pas à vendre. A moins d’avoir besoin de cash supplémentaire,
dû à son isolement abrupt par ses voisins, le Qatar sera ravi de compter sur
des amis et de garder ses opérations à Luxembourg.
Legend Holdings regardera maintenant à son équation : comment
augmenter le rendement de la banque ? Serait-ce en coupant les coûts ou en
soutenant une nouvelle orientation avec une nouvelle équipe?
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