Thursday, November 19, 2015

Jean-Claude Juncker comme syrien était


Qu'il est doux de ne rien faire,
quand tout s'agite autour de soi. Photo ET
























Jean-Claude Juncker comme syrien était

Les méandres du Junckerisme ne supportent pas la mémoire longue, que dis-je, courte non plus.

Le 8 mars 2015, Jean-Claude Juncker, Président non-élu de la Commission Européenne a partagé son idée de génie : nous avons besoin d’une Armée Européenne pour dissuader la Russie de Poutine. L’idée a sombré dans les fou-rires de ses copains au Parlement Européen. Juncker est un champion quand il s’agit de mettre la charrue devant les bœufs, c.à.d. créer des agences et institutions d’un état européen avant de créer un état et son gouvernement européen. On connait les résultats de telles disjonctions dans la pensée : l’Euro qui fonctionne tant bien que mal dans sa propre orbite, et la Politique étrangère commune qui a produit une gentille présence pour les Sommets. Parlons-nous d’une Armée sans pouvoir central, en autopilotage comme l’Euro ? Quoiqu’avec 1,5 millions d’hommes sous les armes (les Etats-Unis 500.000 pour l’ordre de grandeur), l’Europe projetterait de la puissance. Mais c’est un gâchis, les budgets se limitent grosso-modo aux salaires dans la plupart des pays. Pour combattre au Mali, l’on appellera soit Obama soit Uber pour le transport. De toute façon, la Commission n’a plus rien à dire en ce moment. Elle écoutera Merkel et plus récemment Hollande. Nous n’aurons donc pas d’Armée européenne sans ce super état européen, et c’est tant mieux : comme ancien soldat, la dernière horreur que je voudrais voir, serait une Armée Européenne commandée par un Comité d’avocats présidé par Juncker

Le 19 mars, Juncker a expliqué que « nous n’aurons jamais des Etats-Unis d’Europe ». Sans doute est-ce du génie créatif, sinon destructeur issu d’une collision de méditations transcendantales. Il trahit ainsi l’esprit sinon la lettre du Traité de Rome, qui vise à « établir les fondements d'une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens ». Si cet énoncé n’est pas clair, ce serait une belle charge pour ce nouveau Président de la Commission de nous éclairer une fois pour toutes. Ce serait sans doute son unique accomplissement. Le reste lui sera dicté. A moins que notre homme et avec lui les ténors de l’Europe se décident pour « plus d’Europe ». Ce serait ravaler sa langue.

Le 9 octobre, la BBC rapportait que Juncker a déclaré que l’Union Européenne doit améliorer ses liens avec la Russie. Ah bon ? Et la dissuasion alors, souhaitée en mars? Selon Juncker, « l’UE doit restaurer une relation pratique avec la Russie, et ne pas laisser les Etats Unis dicter cette politique ». Jean-Claude Juncker critiquait le Président des Etats-Unis Barack Obama pour avoir décrit la Russie comme un « pouvoir régional ». « La Russie doit être traitée avec décence » a dit Juncker. Il ne doit pas s’en occuper, c’est fait à son insu : le Président Hollande est en charge, et en guise d’Armée Européenne, il a forgé une alliance militaire avec la Russie pour combattre ISIS. Lui au moins a su réaliser un bond dans sa cote de popularité. Il est vrai qu’il s’est présenté comme étant à la hauteur du défi et comme Homme d’Etat dans la crise. Et qui sait, on reviendra peut-être à l’Europe de l’Oural a l’Atlantique. On mettra la Commission au courant quand ce sera fait.

Aujourd’hui le 19 Novembre, Juncker a vraiment connecté les points manquants en critiquant les services secrets européens: il faut une collaboration plus étroite des services secrets européens. Je sais par expérience à quel point c’était difficile d’amener les services secrets européens à partager les listes des « indésirables », un sous-ensemble infiniment petit du Renseignement, pour le système des Visas Schengen. Juncker lui-même a perdu son job parce qu’il était le chef du service de renseignement luxembourgeois SREL, ce qui lui valait de présider à un bon petit scandale a la luxembourgeoise dudit SREL. Pour ce qui est de sa nouvelle proposition, je propose donc d’atteler la charrue devant les bœufs encore et encore, et de créer immédiatement Eurospy sous son experte  présidence. Surtout que la Cour de Justice de l’Union Européenne vient de défaire avec l’aide d’Edward Snowden l’accord « Safe Harbor » sur la protection des données personnelles, tricoté par la Commission il y a quinze ans. Ainsi Juncker pourra recoller les morceaux de  l’éclatement du renseignement européen en 28 particules qui en résulte. Et argumenter qu’en outre cette entreprise n’a pas seulement besoin d’un tube de colle, mais d’un vrai état européen. On n’aura donc pas Eurospy.


En attendant, notre Président désœuvré a meublé ses heures de loisirs par un « nostalgy-trip », en invitant le Grand-Duc pour une visite de son quartier général à Bruxelles : c’était une belle journée. Beaucoup de généraux, pas de soldats. Il y a certes eu une innovation protocolaire ; l’accueil tout en étant chaleureux, était désespéramment  classique. Pas d’embrassade, de tapes dans le dos, de caresses du ventre. Même pas de gifle. Mais doit-il vraiment tutoyer le Grand-Duc en public ?




1 comment:

  1. Bravo Egide, excellente description d'une bien triste réalité.

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