Monday, May 25, 2009

Luxembourg: La Paix a-t-elle Éclaté?

Le Ministre des Finances Luc Frieden signe des traités de non double imposition ou plutôt d’échange d’information là où il peut. La guerre des paradis fiscaux est finie, mais ces traités qui sont ainsi signés, ne sont que des armistices. Ce ne sont pas des traités de paix et les hostilités peuvent reprendre à tout bout de champ. Maintenant que la guerre des paradis fiscaux est terminée, la guerre pour la substance de la place financière aura bien lieu. Cette-fois-ci l’agresseur ne voudra pas assiéger la forteresse pour mieux la prendre, mais pour lui drainer sa substance.

Après la reddition sans conditions de notre garnison en avril, nous pouvons avoir deux attitudes différentes et fondamentalement opposées. « Quand vous arrivez à une bifurcation sur votre chemin, prenez-la » a dit fameusement Yogi Berra, grand joueur de baseball des NY Yankees et champion du langage mal à propos. Cependant, toute absurde que sa recommandation ne semble, elle s’applique à notre situation du moment. Nous avons essentiellement deux choix : celui du prisonnier de guerre, qui traine les pattes pour se plier le moins possible à la volonté du vainqueur, et celui du résiliant, qui se prépare à gagner la prochaine guerre, la fuite en avant.

La mentalité de prisonnier de guerre.

Elle cherche à faire le moins possible, à manigancer et à ériger des villages de Potemkine. Les gardiens deviendront vite suspicieux. A ce stade je crains fort cependant que ce soit le choix préféré de la majorité des acteurs sur la place. Si le nouvellement créé « Luxembourg Institute for Global Financial Integrity » par exemple ne répond pas aux expectations que suggère son titre, ce ne sera qu’un trompe-l’œil vite identifié. Persister dans les invectives des semaines passées serait une autre erreur, qui somme toute coute autant d’énergie que de préparer sérieusement la bataille pour la substance à venir.

La mentalité du résiliant.

Le Luxembourg résiliant prendra l’autre direction à la bifurcation. Il importe d’encaisser la défaite et de la gérer au plus vite pour immédiatement se tourner vers le futur. Les traités qui se signent sont une part importante dans la bonne gestion de l’après-crise. Il restera beaucoup à faire pour se doter des moyens pour se battre avec confiance sur trois fronts possibles : le paradis fiscal, le paradis judiciaire et le blanchiment d’argent. Aucun de ces sujets ne sera tabou.

Voici l’ébauche d’une appréciation de la situation générale et de la situation particulière en ce jour:.

La situation générale :

Le Luxembourg se retrouve isolé dans son environnement immédiat, qui est devenu hostile dans une mesure que nous n’avons pas connue depuis des décennies. Nous avons appris qu’en traitant d’Etat à Etat, les appréciations se font sur les possibilités et non sur les intentions du vis-à-vis. Est-il possible qu’un accord écrit soit déchiré après 2 semaines ? Est-il possible que demain le Congrès américain passe le « Tax Haven Abuse Act » avec des amendements qui rendent l’accord qui vient d’être signé caduc ? Est-ce possible que le besoin d’argent et la jalousie combinés génèrent d’autres pressions sur nous ? Les réponses sont évidentes. Sera-t-on prêt pour affronter une nouvelle vague de crampes intestinales à propos des paradis fiscaux, des paradis judiciaires et de la lutte contre le blanchiment d’argent ?

La situation particulaire.

Force est de constater que le Luxembourg n’est pas prêt pour le prochain round. Celui-ci combinera sans doute des épreuves dans les trois domaines à la fois : paradis fiscal, judiciaire et prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme. Ces trois problèmes seront considérés comme étant liés, et ils le sont dans les questions suivantes :

1. Un cadre légal minimum a-t-il été créé dans les trois domaines?
2. Les lois et règlements sont-ils appliqués crédiblement ? Si la réponse est non, est-ce à cause d’un manque de volonté politique ou un manque de moyens, ou les deux ? Ou est-ce à cause d’une culture locale qu’on appellerait « Mutual reinforcement » ? Le « tout le monde triche ».
3. Y a-t-il des sanctions crédibles en nombres, statistiquement plausibles et crédibles en sévérité ?

S’il y a des « non » à ces trois questions, la préparation de la prochaine bataille sera une vaste entreprise.

No comments:

Post a Comment